PHENOMENOLOGIE DE L’ESPRIT
Conan le Barbare, John Milius, USA,
1982
La décennie qui s’est ouverte un an
avant 1982 va voir s’achever la fin historique du court et terrible
XXème siècle, débuté en 1914, par un premier conflit mondial,
chaudron épouvantable dans lequel furent enrôlés tous les hommes
en âge de combattre en Europe. Ce XXème siècle, le précédent
pour nous, aura également vu se dérouler une seconde guerre
mondiale, d’une violence et d’une horreur sans commune mesure
dans toute l’histoire de l’humanité, horreur planifiée et
exécutée par la société européenne considérée alors comme la
plus « évoluée ». Ce XXème aura enfin connu la brutale
transformation de sociétés archaïques en nations modernes, sous
l’impulsion de régime totalitaires, oppressifs pour les corps
autant que pour les esprits. La folie de ce siècle s'étendit
jusqu’à ces dernières années d’avant 1982, où la démence
idéologique de quelques-uns produisit le troisième génocide
de ce siècle. Le XXème siècle à de nombreux égards, fut celui du
paroxysme de la folie et de la violence humaine, avec sa « guerre
de 75 ans », tout autant qu’il fut pourtant celui de
l’affirmation définitive de la démocratie, de la nécessité du
droit, de la libération des minorités, et parmi lesquelles tout au
moins en Occident mais pas seulement, celle de la « minorité
majoritaire » des femmes. Ces deux faces d’une même médaille
ont bien sûr été forgées avant 1914, dans un monde issu des
périodes révolutionnaires, l’Américaine et la Française,
période d’idéalisme philosophique, politique et moral. Cette
période que l’on considère comme moderne n’était
évidemment pas exempte de violence, et d’ailleurs, la première
guerre dite moderne est bien celle de Sécession, la Civil War
américaine, de 50 ans antérieures à la Première guerre mondiale,
mais où la mort de masse fut pour la première fois expérimentée
sur le démos à la fois soumis et volontaire – peut-être
ces deux faces de la modernité ne sont-elles finalement qu’une
seule et même chose, et peut-être se tue-t-on d’autant plus
férocement que l’on le fait volontairement…
Nous considérons régulièrement, de
manière un peu pompeuse, que nous sommes désormais entrés dans une
époque dite « post-moderne », c’est-à-dire qui se
défie depuis les désastres du XXème siècle, de l’esprit
d'idéalisme et de progrès de la période précédente. Il n’y a
pas de sens de l’Histoire, nos ainés se sont lourdement trompés,
nous sommes désormais en capacité plus que jamais de nous détruire
nous-mêmes, par la force tout autant que par l’intelligence
meurtrière qui nous a permis de mettre au point les moyens de notre
perte – Doom en anglais. Par le corps et par l’esprit,
pourrait-on dire. Cette certitude d’être entré dans un monde où
l’avenir est finalement incertain et la fin toujours proche, s’est
renforcé tout au long du XXème siècle jusqu’à devenir dans les
années 60, l’élément moteur de la contestation de tous les
ordres établis, dans l’Occident « libre », derrière
le rideau de fer soviétique, jusqu’en Asie où les révolutions
socialistes des années 60 et 70 produisirent les derniers délires
ubuesques de libérateurs sanguinaires.
Lorsqu’à l’aube des années 80,
les derniers feux de la contestation des décennies précédentes
s’éteignirent, le monde plus que jamais se savait dans
l’incertitude d’un avenir qu’il n’était plus possible
d’envisager avec espoir. Conan, le barbare, le film de
Milius date de ces années-là. Des années où la civilisation est
arrivée à son terme : elle semble ne plus protéger d’aucune
passion meurtrière, d’aucun égarement politique ou social. La
civilisation a achevé de nous ramener à une époque antérieure à
elle-même, elle s’est niée comme telle. C’est de ce terreau que
va naître au cinéma, par les moyens même que la civilisation a
utilisé contre elle-même, ce genre si typique de l’époque qu’est
l’Heroïc-Fantasy.
Soyons très clair, ce genre n’a
produit au cinéma, dans sa forme la plus pure, c’est-à-dire
désespérée littéralement, que très peu de bons films, mais tout
de même au moins deux chefs d’œuvre, Excalibur, sorti en
1981, et Conan le Barbare, réalisé dans la même année, mais
sortie un an plus tard. Mais, si le genre, en tant que tel a d’abord
décliné toute une série de produits standardisés sans aucun
intérêt si ce n’est celui de surfer sur la vague du succès de
ces deux films, et au passage de faire un peu de pognon, le genre a
quant à lui infusé tout un cinéma, qui est parvenu jusqu’à
nous. Et dès 1982, nous pouvons compter Mad Max 2,
anticipation fortement réductible à une Héroïc Fantasy, mais
également Rambo, et dans les années suivantes, Indiana
Jones et le Temple maudit ou Higlander.
On a beaucoup dit de ce genre qu’il
était la quintessence de l’individualisme reaganien en plaine
explosion dans ces années ; on a dit aussi qu’il était un
genre réactionnaire qui revenait à des stéréotypes, notamment
masculins et féminins, datant de plusieurs décennies. On a dit
enfin parfois que ce genre était fascisant, fasciné qu’il était
par la représentation de la puissance physique, par la
représentation de la violence et de la mort. Rien de tout ceci n’est
complètement faux. Mais c’est aussi l’intérêt de ce genre que
d’être le grand creuset qu’un siècle de barbarie a
fabriqué, non pour exalter celle-ci, mais bien plutôt pour nous
inviter à pénétrer son ambigüité, son ambivalence, son
caractère équivoque. Nous sommes civilisés dans le même temps que
nous sommes barbares, voilà ce en quoi pourrait se résumer l’Héroïc
Fantasy – tout comme le siècle qui l’a vu naître.
Un peu d’histoire des formes. Le
genre est né au début du XXème siècle en littérature, dans les
fameux pulps déjà fréquemment évoqués, sous la plume d’un
auteur que tout le monde connait, Edgar Rice Burroughs, le « papa »
de Tarzan. Ce qui n’était au départ que de l’aventure un peu
alimentaire, se transforma à partir de la seconde moitié des années
10, en un véritable phénomène. Tarzan n’était plus seulement ce
mowgli vigoureux, il devenait un personnage à la musculature
puissante, fortement sexué, en proie à des bêtes géantes, à des
tribus cruelles, à une magie des premiers âges. Burroughs, fils
d’un ancien major de la guerre de sécession, participa lui-même à
la Seconde guerre mondiale – il habitait Hawaï lors de l’attaque
de Pearl Harbour – en qualité de correspondant de guerre. Sa
postérité est immense, il est aujourd’hui considéré comme un
auteur populaire américain parmi les plus importants, un cratère
sur la Lune porte même son nom.
Toutefois, l’héroïc fantasy, si
elle est née avec Burroughs, a pris ses formes « canoniques »
avec l’autre auteur important du genre : Robert E. Howard,
« papa » quant à lui de Conan. Howard écrivit
principalement pour les pulps, Weird Tales notamment,
mais mourut jeune, à 30 ans, se suicidant à la mort de sa mère. Le
personnage est complexe, mélange de noirceur dépressive et
d’exigence obsessionnelle. Sa prose est probablement d’une
qualité bien supérieure à celle de Burroughs, mais sa courte
existence, et le « vol » de sa création la plus célèbre,
ce Conan le Cimmérien par Lyon Sprague de Camp, qui le « prostitua »
à l’industrie de l’Entertainment, éclipsèrent pour longtemps
l’exceptionnelle qualité de son travail.
De vaillants héritiers portèrent dans
les années 60 et 70 très haut la flamme du genre, et rendirent
hommage à l’œuvre de Howard. Parmi ceux-ci, qui bercèrent ma
jeune adolescence, Michael Moorcock, auteur anglais, père d’Elric
de Melnibonée, cousin dépressif de Conan. Moorcock, en bon
« post-moderne » prit la mesure du genre dans lequel il
œuvrait et posa sur lui un regard à la fois loyal et aigu, qui
permit au genre littéraire de se renouveler, dans le même temps
qu’il allait influencer son émergence sur le grand écran. Dans le
registre des lignées étranges et insoupçonnables, Moorcok paya
également son tribut à l’un de nos grands auteurs français, en
réalité véritable inventeur du genre – mais un inventeur resté
un temps sans postérité – Gustave Flaubert, avec son Salammbô,
dont les éditions illustrées du début du XXème siècle témoignent
de l'archéologie du genre. Mathô, c’est Conan, plus encore
qu’Elric, et Hamilcar, c’est Thulsa Doom. Tout le genre est déjà
là dans le roman de Flaubert, auteur considéré à l’égal d’un
Baudelaire, comme l’un des premiers vrais modernes de la
littérature française. Ainsi existe-t-il une paternité hexagonale
aux aventures de Conan, par un auteur qui déclarait lors du procès
de Madame Bovary, son roman précédant : « Ah! comme je suis
las de l'ignoble ouvrier, de l'inepte bourgeois, du stupide paysan et
de l'odieux ecclésiastique »… Il règlera son compte à tous
dans Salammbô, au nom de sa liberté de créateur, qui se
dispensait de toute morale.
Illustrations de Suzanne-Raphaëlle Lagneau pour Salammbô, édition de 1928. |
Car c’est là l’une des caractéristiques de ce genre, et notamment de ses déclinaisons cinématographiques, que de se passer de morale. La Fantasy au cinéma est assez clairement issue du merveilleux, à la fois comme prolongement, mais également comme réaction. Assez de princes et de bergères, assez de fées et de chevaliers, place aux tyrans et aux putains, aux sorcières et aux gladiateurs. Les personnages de la fantasy ne se battent apparemment qu’en leur propre nom, qu’en leur propre intérêt. Les idéaux supérieurs du merveilleux, notamment arthurien, sont abandonnés : il n’existe plus aucun Graal digne de ce nom, sinon celui de pouvoir jouir, sans cesse. « Faire l’amour, faire la guerre, vivre vite et mourir avant d’avoir vieilli, » pour reprendre la devise d’un autre héros fameux du genre, voilà ce qui importe. La vie n’a pas de sens, elle se consomme à défaut de s’économiser. La force physique, la dextérité guerrière, l’astuce et la malice, voire la roublardise, voilà ce qui fait le héros de l’Héroïc Fantasy, ce cynique dont la liberté consiste à prendre tout ce qu’il lui sied. On voit bien ce qu’il y a là d’adolescent, à la fois encore dans l’enfance, le merveilleux, et déjà dans la licence. C’est qu’il est un autre genre – mais peut-on l’appeler comme ça – auquel l’Héroïc Fantasy emprunte beaucoup, c’est bien entendu le cinéma pornographique. Des corps, de la jouissance, peu d’intrigue, des péripéties prétextes aux motifs du genre, des corps, rien que des corps… Ces deux genres ont en commun de véhiculer a priori les mêmes schémas archaïques, où les rapports de domination sont représentés pour être exaltés : domination du fort sur le faible, de l’homme sur la femme, du corps sur l’esprit. Ces deux cinémas se caractérisent par l’affirmation littérale d’un corps triomphant, puisqu’il n’y a rien d’autre à montrer. Ce sont également deux cinémas qui se passent de mots, qui se passent de narration – mais toutefois qui ne se passent surtout pas de mise en scène.
Et c’est là que les choses deviennent intéressantes. Nous avons dit plus haut que l’Héroïc Fantasy prétendait détruire les codes du monde moderne avec les armes même de ce monde moderne. C’est qu’il nous faut désormais aborder plus spécifiquement Conan, et donc nous intéresser à son metteur en scène, John Milius, figure atypique du cinéma hollywoodien, anarchiste de droite, comme l’on dit, libertaire, farouchement indépendant – et grand cinéphile. Ses références ne sont pas américaines. L’on pourrait ainsi penser que la préhistoire cinématographique de ce genre serait le péplum, genre qui acheva le Hollywood des années 50 et 60. Mais le péplum se situe toujours dans une Antiquité civilisée, l'Égypte, la Grèce, Rome. Milius et son monde « d’avant l’avènement des frères Darius », est antérieur à la civilisation, nous l’avons dit, et se réfère beaucoup plus à un cinéma historique non-européen – et donc étranger à notre stricte sphère antique. Le Japon, avec les films de sabre de Kurosawa, la Russie soviétique, avec l’Alexandre Nevski et l’Ivan le Terrible d’Eisenstein, et enfin, l’Allemagne nazie, avec Leni Riefensthal et son Triomphe de la volonté. Milius n’est évidemment pas dupe, et lui faire un procès en totalitarisme serait un pur anachronisme. Mais toutefois, que le cinéma qui l’ait fasciné soit notamment celui issu de trois des pires régimes du XXème siècle en dit long sur le pouvoir qu’il accorde à l’image : oui, si le XXème siècle fut le siècle de la barbarie, c’est aussi parce qu’il fut celui de l’image, contrôlée, exaltée, massifiée, le siècle de la propagande.
Lorsque je dis que Milius dans Conan va utiliser les armes même du XXème siècle pour en faire sinon le procès, tout au moins une forme plastique d’analyse, il faut bien entendre que c’est par le biais des moyens utilisés pour fasciner un spectateur qu’il va donner son pouvoir à l’image. Et quel est ce pouvoir sinon la mise en scène ? C’est probablement là l’un des aspects les plus éloquents et du genre et de l’époque : dans la société du spectacle, tout ne peut pas faire spectacle. La mise en scène est toujours mise en scène de quelque chose. Et ce quelque chose, dans le cinéma, fondamentalement, c’est du corps. Le cinéma est un matérialisme, en ce qu’il travaille à partir d’une glaise qui est le corps de l’acteur, et la manière de le sublimer, dans un sens ou dans l’autre. Là encore, c’est quelque chose de tout à fait commun entre l’expression de la violence et celle du sexe, entre l’héroïc fantasy et la pornographie. Il est éloquent que chacun de ces deux genres n'ait donné qu’une si petite poignée de bons films, et une myriades de produits de consommation dont la vénalité dit tout, d’abord de la société qui en jouit.
Ce rapport du corps au regard, c’est
l’un des sujets centraux de Conan le barbare. De nombreux
autres aspects du film mériteraient d’être développés, mais
nous nous contenterons pour l’heure de celui-ci – il nous faudra
bien un jour parvenir à faire plusieurs chroniques sur un même
film…
Le film s’ouvre par une citation de
Nietzsche : « Ce qui ne vous tue pas vous rend plus
fort », avec en fond sonore quelque musique primordiale à base
de tambours graves et sépulcraux. Cette citation a beaucoup fait
gloser, rapprochant une fois encore le geste de Milius d’une
référence directe à une idéologie fascisante. Il me semble en
fait qu’il faut dans ces quelques secondes beaucoup plus lire
quelque chose de Darwinien que de « volonté de puissance ».
C’est une lapalissade en matière d’évolution : ce qui ne
tue pas permet de s’adapter. Et dans ce monde qui n’a plus ni
sens, ni donc origine ou but, le programme ne sera que de rester en
vie pour évoluer, et d’évoluer pour rester en vie. Et
c’est bien ce programme qui va donner son sens au récit que
s’apprête à nous raconter par l’image Milius : bien plus
que nietzschéen, son projet me semble hégélien. Conan est
l’incarnation du corps – peut-être même avant le corps, de la
matière – qui va lentement, par contradictions successives,
s’élever à l’esprit, et donc à la liberté, d’abord
individuelle, puis collective. Tout ce programme passe par la mise en
scène du rapport du regard au corps – de la relation de celui qui
regarde à celui qui est regardé, programme de cinéma s’il en
est.
Après cette première image, c’est
la forge primordiale qui éclaire de son feu l’obscurité de la
nuit d’Hyperborée. Conan se termine ainsi exactement là où
commençait le nihiliste The Thing – et Conan sera le
contraire d’un nihiliste. La première apparition humaine est celle
du visage plongé dans l’obscurité de Conan enfant qui assiste à
la réalisation de l’épée d’acier qui prend forme sous ses
yeux. La matière est en mouvement, est Conan la domine : il la
regarde. L’épée chauffée au rouge est refroidie, plongée dans
la neige, dans un geste à la symbolique sexuelle tout à fait
claire : l’acier prend sa forme finale en plongeant et en
ressortant de la terre. Ce mystère de l’acier, sur quoi se
fonde la théologie de son peuple, sera la seconde scène du film,
qui nous présente en longs plans fixes le père de Conan expliquant
à son fils en quoi ils ne sont que des hommes – « pas des
Dieux, ni des géants » - ayant hérités par une erreur toute
prométhéenne du secret de l’acier. Cet héritage engage cependant
à ne se fier « ni aux Dieux, ni aux Hommes, ni aux Bêtes »,
les trois rangs classiques de la Création étant défié à l’égal.
A l’acier, l’on peut se fier seulement… Bienvenus dans un monde
où la paranoïa, loin d’être un motif de dislocation sociale, est
l’élément qui permet à un peuple de vivre en communauté. Dans
un geste assez inouï, Milius retourne là le motif Hobbessien de
l’homme, loup pour l’homme. La vie à l’état de nature, la vie
sauvage, sans le socle de l’Etat social, n’est pas un problème :
nous pouvons vivre ensemble pourvu que nous ne nous fiions à
personne – sinon à la matière seulement. Un retour au réel qui
semble nous dire que toutes les constructions sociales possibles sont
de fait des constructions fictives dont la réalité ne résisterait
pas une seconde à la lame tranchante d’une épée. Bienvenus dans
un monde réel.
Comme illustration directe de cet état
de fait, le village est attaqué par une bande de cavaliers en armes.
Il faudrait là évoquer la magnifique musique de Basil Poledouris,
qui contribue à la force du film, tant les dialogues sont rares –
et c’est très bien ainsi, nous sommes dans un monde où l’on ne
parle encore qu’à peine. Cette séquence d’attaque du village,
et du massacre de tous les villageois qui s’ensuit, nous rappelle
qu’Oliver Stone fut le premier scénariste de Conan, et qu’en
tant qu’ancien soldat américain au Vietnam, une scène comme
celle-ci, il l’a peut-être vécue, non du côté des villageois,
mais bien des assaillants – en l’occurrence l’obscur Thulsa
Doom, aussi majestueux que cruel. La première image de l’attaque
est celle d’un homme au corps peint, un guetteur, qui
bondit, tel un animal sur une souche d’arbre, pour indiquer dans un
geste du bras à tout le groupe, où se trouve le village. L’attaque
magnifiquement filmée sera rapide. Le père de Conan sera dévoré
par des chiens qui ne semblent pas se différencier de certains des
hommes de Thulsa Doom – tous sont ou grimés, ou casqués. Leurs
visages ne se distinguent pas. Ils sont cachés aux villageois.
Conan et sa mère, les deux derniers survivants, s’apprêtent à affronter Thulsa Doom, descendu de cheval. La mère de Conan a saisi une épée et la tient en garde contre les lieutenants de Doom, puis contre l’impénétrable chef lui-même. Cette séquence est interminable, rythmée par un long morceau élégiaque de Poledouris. Thulsa Doom, et avant lui ses lieutenants, ôtent leur casques et prennent le temps de saluer la jeune mère et l’enfant. Puis un échange de regard entre Thulsa Doom et la mère de Conan dure une éternité – et semble traduire l’émotion de Doom. Avant que celui-ci, se retournant brusquement, ne décapite la jeune femme qui tient encore la main de son enfant. Évidement, la mise en scène de Milius se délecte à cet instant d’une cruauté extrême. Mais toutefois, la mort de la mère n’interviendra qu’hors champs, et nous autres spectateurs, n’en seront témoins qu’en étant témoins du regard de Conan sur elle – et sur ce corps qui vient de perdre son visage. Ce moment marque la première mort du héros.
Il sera ensuite emmené comme esclave
jusqu'à la Roue de la douleur, magnifique image littérale, et
tournera cette roue insensée durant plus de dix ans. Alors qu’il
est une fois encore longuement filmé en train de pousser cette roue,
d’abord en compagnie d’autres enfants, puis à la fin, plus âgé,
seul survivant du fait de sa force physique, son visage disparaît.
Nous ne voyons plus que son corps. Conan dans cette première mort,
est devenu un rouage, un élément matériel, strictement charnel.
Son vieillissement ne nous sera représenté que par les images de
son corps, et notamment de ses jambes et de ses pieds qui s’enfoncent
dans le sol comme s’ils y prenaient racine. Ce corps, d’abord
chétif, à la fin puissant, résume tout à fait Conan. Cette scène
d’une abstraction totale en termes de narration, est filmée là
avec les plus concrets des moyens de mise en scène : le corps
d’un comédien. Ce comédien, c’est bien sûr Arnold
Schwarzenegger, et c’est son visage, inexpressif, indifférent, qui
nous apparaît alors, lorsque Conan, parvenu à l’âge adulte
relève la tête de cette roue du malheur.
Le visage abruti du comédien autrichien sied parfaitement à la situation. Conan lorsqu’il relève la tête, n’est peut-être plus seulement un rouage, mais il n’est pas plus qu’un animal. Lorsque dans la séquence suivante, son maître s’adresse à lui, c’est par ces mots : « assis ! ici ! ». On ne peut pas être plus clair.
Conan, vendu donc à ce nouveau maître,
devient gladiateur. Son premier combat, il ne le comprend pas, et ne
parvient à vaincre qu’en se défendant – en s'adaptant. Puis de
combat en combat, il s’affirme, découvre ses dispositions
guerrières, et finit par se complaire dans l’arène. C’est qu’on
le regarde. La foule est là qui l’acclame, l’encourage,
s’excite à son spectacle. Et Conan se délecte de cette
excitation. Lors du premier combat, il est presque nu, jeté là en
pâture à un gladiateur plus expérimenté que lui. Au fur et à
mesure de ses victoires, son accoutrement évolue. Il est très clair
qu’une certaine tendance SM pointe alors dans ses costumes :
de la nudité, il passe au vêtement, mais un vêtement qui continue
à l’associer au seul corps triomphant qu’il est.
Conan n’a donc plus de vie que
publique. Il se retrouve sans cesse en situation d’exhibition. De
ces premiers affrontements dialectiques, pour parler comme Hegel, qui
l’ont vu passer de la machine à l’animal, puis de l’animal à
l’esclave – objet encore, et non sujet, mais objet de spectacle –
va émerger une première parole de Conan – et le terrible accent
de Schwarzenegger en souligne l'âpreté. Installé comme un trophée
sur une table, on lui demande d’énoncer la vérité des maîtres à
propos du but de toute vie : « Écraser ses ennemis, les
voir mourir devant soi et entendre les lamentations de leurs
femmes. », soit assister exactement à ce qui est arrivé à sa
famille… Conan est un esclave, dont les victoires sont néanmoins
récompensées, notamment par des femmes – on parle alors toutefois
de l’accoupler aux meilleurs reproductrices, son statut animal
n’est pas évanoui. Ces accouplements se font sous le regard des
maitres. Ainsi le pouvoir n’est pas la force – Conan est bien
plus fort que ses maîtres – mais la capacité à l’intimité,
dont il est totalement privé. Conan est un corps qui peut être vu
en permanence, il n’est que là pour ça : être ce corps en
spectacle dont on se repaît.
Lorsqu’enfin libéré, et abandonné
à lui-même, il se débarrasse de sa pelade d’animal, il meurt une
seconde fois. Ces différents passages dans le monde des morts sont
autant d’étapes qui lui permettent de s’affranchir et de
s’élever du corps à l’esprit. Poursuivi par des loups, il
dégringole accidentellement en cherchant à se débarrasser d’eux
dans une grotte qui est un tombeau funéraire. Tout à coup il se
retrouve enfin seul - ni hommes, ni bêtes à l’affût de se
repaitre de lui. Allumant un feu, il découvre alors dans cette
nouvelle solitude, ébauche de sa naissance en tant qu’homme, la
compagnie de morts en majesté – des guerriers sont enterrés là.
Un premier élément de civilisation : il y a là l’un des
grands motifs de la Fantasy, la présence des morts parmi les
vivants, dans un environnement à la fois inquiétant, et pourtant
tranquillisant. Le sacré de ces dépouilles oubliées et tout à
coup rappelée à un souvenir mythique nous renvoie à la permanence
de l’esprit, même sous forme de squelettes desséchés. Cette
« théologie » mettra un second mot dans la bouche de
Conan : « Crom », le dieu de son peuple,
depuis longtemps oublié. Ainsi la mémoire, le sacré, mène-t-il ce
sauvage à l’orée de son humanité : c’est en récupérant
l’épée de l’un de ces morts, et en se débarrassant de sa
pelade, qu’il va désormais pouvoir affronter les loups et gagner
sa place parmi les hommes, après s'être réapproprié sa propre
parole.
La liberté de Conan est donc passée
par la mort, littéralement, et par les armes. Le fantastique durant
toute cette scène est assez subtil : lorsque Conan s’empare
de l’épée du mort, le squelette de celui-ci s’effondre,
induisant un effet de fantastique qui n’existe que dans le regard
du héros, mais qui nous atteint. Désormais, nous autres spectateurs
sommes enfin avec lui, dans son regard.
La scène suivante n’est probablement
pas la plus réussie du film. Il rencontre une sorcière qui le
séduit sommairement : « J’ai un bon feu. Tu veux te
réchauffer auprès de mon feu ? »… Cette sorcière est
une figure de Pythie : elle dit l’avenir, si l’on couche
avec elle. Conan se prostitue donc auprès d’elle. Ce rapport
sexuel a tout du combat de gladiateur présenté quelques instants
plus tôt, et se termine d’ailleurs dans la violence, la sorcière
s’avérant un genre de démon. Une fois encore, ce premier rapport
d’égalité à l’humanité se fait par la réduction du regard :
la séduction de la sorcière, son appétit sexuel, soumet Conan à
son seul regard. Il est alors l’homme-objet qui fait jouir l’autre.
Lui n’a pour son compte que l’inquiétude et l’incompréhension.
La scène suivante est essentielle, il
s’agit de la rencontre avec Subotaï, archer et voleur, qui
enchainé à une montagne, « s’apprête à faire un repas
pour les loups ». La rencontre et l’amitié des deux hommes
se scellera sur un rire partagé – le propre de l’homme.
Lorsqu’ils deviseront ensemble de leurs dieux respectifs – celui
de Conan quelque part sur sa montagne, les Quatre Vents de Subotaï
qui sont « au-dessus de Crom » - une intimité nouvelle
apparaît qui rehausse Conan enfin à son semblable. Il est un homme
et il n’est plus seul.
Ne lui reste plus qu’à rencontrer
une compagne, ce sera chose faite dans la scène suivante, où en
compagnie de Subotaï, partis à l’assaut de la tour de Seth, ils
rencontrent Valeria, elle aussi voleuse, et qui prétend ravir au
prêtre de Seth le rubis qu’il garde caché dans sa tour, sous la
bonne garde d’un serpent géant. Conan, Subotaï et Valeria
profitent d’une cérémonie de la secte – qui consiste à
longuement déshabiller la jeune femme offerte en sacrifice au
serpent – pour voler le rubis, dont l’apparence se confond avec
l’œil de l’animal monstrueux. La séquence de séduction entre
Conan et Valéria, à la suite de cet exploit, reste un modèle de
mise en scène : Valeria et Conan sont assis à une même table,
le rubis/œil de serpent est posé sur la table entre eux. Valeria
regarde le rubis, Conan regarde Valeria, Valeria saisit le rubis,
Conan abat sa main sur celle de Valeria qui enserre déjà le rubis.
Conan lui donne le rubis. Valeria regarde Conan. Ils se regardent.
S’ensuit une scène d’amour. Ils se dévêtissent dans l’intimité
de leur chambre. Pas une seule parole n’a été échangée :
ils sont des corps qui prennent conscience d’eux-mêmes, voilà ce
que nous dit la mise en scène – et elle se passe de mots.
Lorsqu’ils échangeront paroles et confidences dans les plans qui
suivent, nous ne les entendrons pas – leur intimité désormais
excède le récit, et exclue même le spectateur. Conan est désormais
un homme accompli : il est libre, il aime, il est un sujet.
Lorsque la suite du récit nous
introduira à la cour du Roi Osric, qui leur demande, à eux, ces
impudents qui ont bravé les serpents de Seth, de lui ramener sa
fille, embarquée dans le délire de la secte de Thulsa Doom – le
revoilà ! –, un nouvel élément viendra s’ajouter à
l’accomplissement de Conan : le désir de vengeance. Le voilà
passé du souvenir de son peuple à la volonté de le venger. Ce sera
le motif d’une première séparation avec Valeria, qui lui demande
de « passer son chemin ». Conan ne la regarde plus, tout
est dit.
Devenu cavalier, homme dominant
l’animal, il se rend jusqu’à Thulsa Doom, sorte de gourou
despotique, aussi mystérieux que sibyllin. Sa Montagne du pouvoir
est son siège – sorte de temple au sommet d’une colline évoquant
une pyramide maya. « Je vous vois ! Je vous observe ! »
hurle-t-il à ses fidèles, dont les prêtres se camouflent également
derrière de longues toges, affirmant par là la prééminence du
regard comme motif effectif de pouvoir sur l’autre. Thulsa Doom
avant d’être un guerrier, est un metteur en scène. Sa terreur
tient autant dans son pouvoir que dans sa capacité à le mettre en
scène. La manière qu’il aura dans cette première scène de
confrontation de débusquer Conan et de le soumettre passera une fois
encore par le regard : l’infidèle est crucifié sur l’Arbre
de la douleur, à nouveau nu, à nouveau ramené au rang de l’animal,
obligé qu’il est de se battre contre les vautours qui l’observent
pour s’en repaître. Lorsque Subotaï vient le sauver, c’est le
rire qui le ramène parmi les humains.
De cette troisième mort, de ce nouveau
passage par le royaume des ombres, c’est Valeria qui va le sauver.
Lorsqu’il sera revenu à lui, sa nudité cette fois sera assumée.
A nouveau un saut dialectique s’est produit : non seulement il
est libre, mais il est maintenant maître de lui-même, non plus
soumis à ses passions. Il se rationalise, et c’est ainsi
qu’il pourra vaincre Thulsa Doom.
Subotaï et Valeria l’accompagneront
sous la montagne du Destin, le repaire de Doom, où en pleine orgie
sexuelle et alimentaire, les affidés du despote sont à la merci des
trois héros. Cette orgie dit quelque chose encore du rapport au
regard et à la mise en scène du propos du film : ce groupe
d’hommes et de femmes ne connaît pas d’intimité, il est soumis
au regard de Thulsa Doom qui domine la scène – il est assis et
regarde impassible ses compagnons jouir dans un amalgame de corps qui
abolit toute différenciation entre individus. Doom, en position de
voyeur absolu, organise l’existence même de cet entre-soi de ses
alliés. Seul son regard permet l’orgie. Ainsi, le fantasme d’un
monde de plaisir et de jouissance n’existe-t-il que par la grâce
de celui qui l’autorise pour s’en assouvir. De l’anthropophagie
symbolique – fantasmatique – un peu à l’image de
l’anthropophagie littérale du repas servi durant cette scène :
des morceaux d’hommes.
Ce monde de fantasme cèdera brusquement sous les coups de Conan. Le héros apparaît ici comme le retour du réel : la destruction du temple nous ramène à la réalité de la matière. Conan est un iconoclaste : il brise les images, littéralement, pour s’en libérer. Il est un profanateur, comme dit Thulsa Doom. Lors de la fuite après l’attaque, Valeria est mortellement blessée, et Conan la perd cette fois définitivement.
Lors de la contre-attaque des hommes de
Doom, Conan adresse une prière à son Dieu : un contre la
multitude, voilà ce qui compte. Un autre palier est franchi, Conan
est désormais un homme révolté, qui va mener l’histoire, même
si celle-ci n’est que bruit et fureur. « Et si Tu ne fais que
regarder, alors, reste à l’écart de tout cela »,
adresse-t-il aux Dieux, qui eux-mêmes n’ont plus le droit d’être
de simples spectateurs. Lors de l’attaque, l’un des lieutenants
de Thulsa Doom croira voir Conan et, trompé, sera empalé par
un piège installé par notre héros, qui le regardera longuement
mourir – ultime spectacle de pouvoir s’il en est. Tandis que
l’autre lieutenant de Doom, sera aveuglé par une Valeria
revenu un instant des Enfers, permettant à Conan de prendre le
dessus dans ce combat difficile.
L’affrontement final entre Conan et
Thulsa Doom sera assez bref. C’est la nuit, Doom domine la foule
éclairée de flambeaux en contre-bas du temple. Après un échange
sur la filiation/paternité de Conan et Doom – on pourrait écrire
encore trois pages à ce sujet en vertu de ce que l’on a déjà dit
de 1982 – et un regard face caméra de Doom, Conan lui tranche la
tête qu’il brandit à la foule en contre-bas. Ainsi, Doom
regarde-t-il une fois encore ses fidèles, mais d’un regard
désormais vide de vie. Conan a vaincu le
regard de son ennemi – et l’a offert en spectacle
à la foule. A la suite de ce dernier geste, les fidèles jettent un
à un leur torche dans l’eau du bassin situé au bas de la
montagne, et quittent les lieux, libérés de leur aliénation par le
regard. La mise en scène se défait, le temple se vide
intégralement. Conan reste seul, dans l’attitude du penseur, le
regard désormais plongé dans son intériorité – il est désormais
l’esprit de la liberté. Après n’avoir pas su ce qu’il disait
à Valeria lors de leurs échanges amoureux, nous ne saurons pas ce
qu’il regarde au-dedans de lui-même.
Conan se saisit d’un flambeau, se saisit de la Lumière pourrait-on dire, et d’un geste ample le projette jusqu’au sommet du temple. Alors qu’il s’éloigne dans la vallée, le temple brûle. Au loin, le jour se lève. Il n’y a plus rien, ni personne. Il n’y a plus besoin.
Pour finir, et parce que ce post est
décidément beaucoup trop long – et parce que nous pourrons
continuer sur Conan ce samedi !- une petite « correspondance »
personnelle. Cette dernière image m’a toujours fait penser à une
autre image, fameuse, d’un film d’animation français, célébrant
de la même manière l’émergence de l’esprit et la chute des
tyrans, il s’agit de la dernière image du Roi et l’Oiseau, de
Paul Grimaud. Il s’agit là de mon premier vrai souvenir
cinématographique, d’une image restée imprimée en moi depuis la
petite enfance : celle de cet immense robot libérant un petit
oiseau de la cage où il est emprisonné, puis d’un geste puissant
et résolu, écrasant de son poing cette même cage, l’annihilant
littéralement. Voilà la plus belle manifestation de l’esprit, à
travers la puissance d’un corps ! Quelque chose que je ne
parviens décidément ni à trouver cynique, ni à trouver nihiliste.
Conan ou l’enthousiasme de la libération.
A samedi.
J''ajouterai juste, sans contredire Matthias, que je crois qu'on sait très bien ce que Conan dit à Valeria, c'est même un des cœurs du film, et il faudrait développer, sur un motif en écho à celui de la méfiance évoqué au dessus, le motif de la confiance (scellé par la confidence), mais ça, c'est une autre chronique...
RépondreSupprimerEn attendant, Arnold S. va revenir à Conan pour un "Legend of Conan", suite directe de ce chef d'oeuvre... Je ne pense pas que Milius sera impliqué.
RépondreSupprimerHey, ça fait plaisir de te voir ici- il faut qu'on se voit en vrai, je sais- quand à la "nouvelle" du Conan avec Arnold...j'attends que ça se fasse, j'ai des gros doutes. les Wachovski, alors au sommet de leur crédibilité n'avaient pas réussi à produire Crown of Iron. Là, je ne comprends même pas qu'ils veuillent remettre de l'argent là dedans, et apparemment c'est Universal qui s'en occuppe et qui veut faire une grosse production. Je serais surpris que ça se fasse vraiment, et si c'est la cas, je suis certain que ça n'aura aucun interêt artistique. J'ai résumé ma pensée à la fin du Double feature Conan, je pense qu'on a tout ce qu'il faut sur le personnage et que maintenant, il faudrait arrêter et se tourner éventuellement vers de nouveaux horizons. Elric ?
RépondreSupprimerNe dis rien sur Elric, ils seraient capables d'en faire faire un par Burton avec Johnny Depp. Je ne vois guère qu'un Del Toro pour le faire, et je pense que son planning est pris jusqu'en 2045 ou qu'aucun grand studio ne lui donnerait x millions pour rester fidèle au personnage. Marcus Nispel serait-il intéressé ? Il faudrait un grand cinéaste indépendant, sans des abrutis de grands studio, pour s'y attaquer ; et franchement à part un Jackson ou un Cameron, qui aurait ce pouvoir ?
RépondreSupprimerLe Conan d'Arnold S.... Ce bon Arnold traîne son projet du roi Conan depuis 20 ans comme il traîne derrière lui son accent. Le scénario de Milius (le second d'une trilogie je crois) ne sera pas utilisé car les droits appartiennent à un autre studio ; j'ai le souvenir d'un scénario (lu sur le net) avec un vieux Conan pensif et dépressif, quasi-suicidaire, jusqu'à son réveil. Je ne pense pas qu'un tel scénario les intéresserait ; pas très hype. Et reste l'inconnue Arnold S. Il n'en reste pas moins que cette nouvelle m'excite.
Sinon, vous m'avez donné envie de revoir une nouvelle fois Conan, mon film de chevet (si tu te souviens bien). Après vous avoir lu (ici votre discussion), j'ai méprisé mon vieux dvd et ai trouvé le bluray. J'en parlerai après. Je frémis de bonheur et d'introspection à l'idée des dialogues ou regards entre Conan et Subotai. Votre blog est si passionnant et creusé qu'on n'a pas envie de dire "cool" "j'aime bien" "c'est caca". Si, pour le Conan de Nispel, c'est très caca.
Ah Lemmy, je reconnais bien ton délicieux sens de la mesure. Mépriser le DVD, allons ! Nous qui pendant des années avons usé les misérables VHS recadrée qui furent notre seul recours pour la téléportation à l'âge Hyborien, ce DVD fut une véritable bénédiction. Le Blu-ray est cela dit magnifique, et nous révèle encore un peu plus de détails et de nuances dans les arrières plans obscurs, mais riches de détails du film, comme lors de la visite à Zamora-je crois- ce chévrier s'addonant à des joies bien païenne avec son bétail- si si, regarde bien, deux secondes avant que Conan n'assome le pauvre chameau qui passait par là.
RépondreSupprimerPour Nispel, tu as raison, nous aurions pu, effectivement, nous contenter d'une formule aussi lapidaire que la tienne, quoi qu'un peu plus vulgaire.
Tes compliments me vont droit au coeur- que dire: nous n'écrivons que pour être lus par des gens comme toi. Et concernant le Train... fais passer le lien !
Elric par Del Toro... pourquoi pas. Mais il m'inquiète un peu, le Guillermo avec sa folie des grandeurs. Jackson ? Pitié, j'en peux plus des gros plan d'yeux qui roulent et des plans de paysage shooté de l'hélicoptère.
Il faut aussi se dire que l'amoureux d'héroïc fantasy doit peut-être divorcer du cinéma, et retourner chercher le plaisir entre les pages de ces bons vieux livres. C'est un peu comme la SF. Au fond, mis à part Conan, aucun film tourné ne procure le plaisir qu'on peut avoir à lire 30 pages du Howard de La tigresse de la côte noire ou Les clous rouges.
Même si Neil Marshal a donné beaucoup d'espoirs avec deux films que j'aime beaucoup, et qui contiennent de pures séquences d'Héroïc-Fantasy, bien que ne relevant pas du genre: Doomsday et Centurion.
Je tarde à répondre, mais mon accès au net était limité. Je me repens ; j'étais heureux de jouir du dvd pour regarder avidement les muscles d'Arnold. Je l'ai revu depuis la semaine dernière en blu ray et c'est magnifique. La scène hédoniste dont tu parles est effectivement assez perceptible et je crois l'avoir remarquée avant mais l'avais zappée depuis. Bravo pour ton sens de l'observation.
RépondreSupprimerMaintenant, ce qui me marque dans Conan que j'ai redécouvert, ce sont toujours les scènes où les deux bonhommes se déplacent en courant, qui changent radicalement des chaînes où tous les deux étaient confinés et enchaînés.
Concernant le potentiel futur Conan, il ne fait pas espérer grand-chose ; le futur scénariste et homme derrière ça s'est occupé des derniers "Fast and Furious" à la manière du chevrier (qui n'en pas un, car c'est un lama qui fait l'objet de sa dévotion) de la scène de Conan. Je doute qu'il retrouve le ton de ce Conan et ne s'attache qu'à une virilité de pacotille et une réflexion éculée sur l'âge.
Dire que le seul Conan que j'ai vu au cinéma est "Conan le destructeur". Et le pseudo remake.
Neil Marshall a retrouvé quelque chose d'excitant dans "Centurion". Il y a aussi des scènes à pied, non, mais qui sont plutôt des scènes de traque. A revoir. "Doomsday" est un curieux objet filmique, un pot-pourri allant de film en film.
Cesse de te répendre, déjà, une fois ça suffira bien, éventuellement.
RépondreSupprimerUn lama, dis-tu ? Diable ! pas si aiguisé que ça, l'oeil du chef de gare !
Au delà de son côté "pot-pourri", je trouve que Doomsday en particulier, et le cinéma de Marshall en général, retrouve une sauvagerie païenne, joyeuse- assez typiquement anglaise (ou Australienne) et un esprit rock'n'roll qui n'est plus si fréquent. Je pense à la scène de cannibalisme de Doomsday, hallucinante et magnifique.
Pour le Conan, comme je te le disais, je n'en attends strictement rien de rien, et mes plus grands espoirs sont que, à un moment ou un autre, le projet se casse la binette. Parce que les grandes déclaration des producteurs, on sait où ça finit, en général.
La scène du cannibalisme/Kebab postMadMax de Doomsday est effectivement assez marquante. A l'évidence, je sentais un poil (brûlé) de Carpenter dans ce film. Je me demande ce que va faire Marshall à l'avenir.
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