dimanche 26 avril 2020

14/31 : Justice League 2017




ça marche comment ?

Oh que c’est compliqué ! Avec une boite, appelée « Boite-mère », typique macguffin de ce genre de film de super-héros, et déclinaison narrative de la Kryptonite bien connue, qu’il faut actionner dans un chambre amniotique, grâce à un courant électrique que va fournir l’un des personnages nouveau-venu, le jeune et espiègle Flash, et grâce aussi à la technologie dont dispose un autre personnage nouveau-venu également, le Cyborg, lui-même maintenu en vie grâce à cette science extraterrestre… Ah oui, parce que je ne vous ai pas dit, tout cela est évidemment extraterrestre, comme Superman pour le coup, même si la « Boite-mère » utilisée est celle des Humains, et non celle des Atlantes ou des Amazones, allez comprendre…

Bon, vous aurez compris, tout ce bric-à-brac à la croisée de la fantasy, de la science-fiction et, ne l’oublions pas, du film d’action franchement bourrin, c’est pas vraiment ma tasse de thé. Et pourtant, j’aime chacun de ses genres, et pourtant, j’aime le héros kryptonien… Nous avons eu une petit conversation avec le Chef de gare au sujet de Superman il y a quelques temps, et pour lui comme pour moi, il était évident que parmi les résurrections essentielles du cinéma, il y en avait forcément qui concernaient Superman : celle dont il nous a entretenu hier, mais aussi, liste non exhaustive, celle du Superman returns, de Singer, hommage (un peu trop) appuyé au film de Donner, et donc celle de ce Justice League, qui structure tout le film - le film s’ouvre sur une scène d’enterrement. Il faut dire que cette résurrection succède à la mort de Superman, point d’orgue d’un précédent opus, déjà dirigé par Zack Snyder, Batman vs Superman, d’une tenue autrement plus rigoureuse, mais qui déjà brodait pendant plus de deux heures sur un motif consacré du genre, depuis le fameux « coup » éditorial de DC Comic, qui tua son héros au début des années 90’ - c’est en tout cas ce que m’a raconté le Chef de gare, je ne suis pas lecteur de comics. Au passage, Superman qui meurt en 92, 93, tout un symbole ! Le monde n’avait-il plus besoin alors de Superman ? 

C’est peut-être là d’ailleurs l’une des limites des films de Snyder, que de s’adresser aux fans, et de se présenter à la fois comme un méta-discours sur les personnages archi-typés de DC tout autant que comme une vague réflexion sur notre époque. Bon, dans Justice League, il a un peu abandonné la prétention à l’époque pour garder surtout la grosse baston, mais tout de même, à sa façon clichetonneuse assumée, Snyder nous offre quelques méditations et poncifs sur le mal, l’Humanité et le « Leadership »… 

Quand on n’est pas coutumier de ces histoires, qui ont tout des codes d’une fantasy urbaine, avec ses races et ses histoires, qui nous sont presque racontées à la façon d’un Jackson dans Le Seigneur des anneaux, tout ceci nous apparait tout de même comme une macédoine absolument indigeste qui finit par nous ennuyer largement… Sans doute n’ai-je plus l’âge depuis longtemps de la cible publique, c’est vrai, mais c’est bien là que le bât blesse : comme l’a dit superbement le Chef de gare hier, Superman, c’est l’enfant en nous, le fantasme de la toute-puissance qui n’existe que parce qu’on sent bien, progressivement, que la réalité ne nous la permet pas. Cette enfance, nous l’avons souvent dit dans le Train, continue de vivre en nous lorsque nous sommes adulte, à l’état de souvenir, plus ou moins vigoureux, plus ou moins nostalgique, mais comme la réminiscence de ce qui nous a fait adulte. Avec Justice League, au contraire, on alimente le fantasme régressif de l’adolescence : la bande de potes, la fanfaronnade, la belle en mini-jupe, le copain richard, toujours pratique, avec sa super-bagnole et son super-appart… Le personnage central de ce film, ce n’est pas Superman, ce n’est pas non plus Batman, c’est bien sûr Flash, le jeune introverti qui s’ouvre au monde. Si le monde a besoin de Superman, c’est surtout que la « team needs Clark » - autre fameux introverti - comme le dit Bruce Wayne. Au fond, le monde, ici on s’en fout un peu. Il est pour une fois - c’est rare dans un film de Superman - réduit à une famille pauvre russe (mais « russe du nord » hein!, pas genre russe un peu arabe du sud quand même) : dans Justice League, le monde a disparu, restent les copains et les complices, restent eux et nous. Justice League n’est plus qu’un film de guerre, pour s’amuser, dans la plus pure tradition teenager… 

Toutefois, je ne me moque pas complètement. Je pense que chaque adolescence a ses univers, et ceux-ci sont essentiels aussi dans la construction des adultes que nous devenons. Mais l’adolescence est exclusive : elle rejette l’enfance et l’âge adulte. C’est même sa définition. Alors que l’enfance est en partage, comme Superman l’est, ou devrait l’être. Il n’y a pas de second degré dans l’enfance : Superman ne peut pas mourir, il est invicible, peu importent les coups éditoriaux et leurs commentaires. 

Alors tout simplement ce Justice League n’est pas fait pour moi… Superman ne peut pas ressusciter, puisque Superman, en fait, ne peut pas mourir.

ça vaut le coup ?

Non. Sauf si vous avez plus de 12 ans et moins de 18…  

c’était mieux avant ?

Avant, au cinéma, on n’avait pas besoin de tout cet attirail pseudo-mythologique, qui relève déjà du commentaire - même un peu pauvre. Alors évidemment, Flash, c’est Mercure, Diana, ben c’est pas dur, c’est Diane, Arthur, c’est Neptune, Victor, Vulcain, etc. Mais à la fin, rassurez-vous, on a quand même le Messie, à l’instar de Néo ou du Starman. Décidément, notre culture judéo-chrétienne est peut-être trop enracinée en nous pour nous permettre de nous bouleverser avec autre chose que le ciel au dessus de nos têtes et la loi morale au fond de nos coeurs…

Je ne reviendrai pas non plus sur la composition de la bande : une femme, un noir, un jeune, un « natif », et tout de même, un blanc, hétérosexuel, riche et chef du groupe… On sait bien qu’Hollywood doit faire avec les contraintes d’un certain « politically correct » qui a un poids autrement plus fort là-bas que chez nous, mais quand à la fin, ça se prend les pieds dans le tapis comme ici, on ne peut s’empêcher de ricaner un peu… 

Et pourtant quand on voit la violence du film, avec ses morts par paquets, ses tortures un peu plus que suggérées, sa mitraille à tout va, et son second degré qui enveloppe tout ça, on ne peut s’empêcher de voir dans ce film tout ce qui fait aussi de l’adolescence un moment littéralement réactionnaire - et néanmoins jubilatoire - de la vie : seul contre tous ! Allez, sauvons tout de même la scène où bien malgré lui, Jason Aquaman Momoa se livre à ses compagnons parce qu’il est assis sur le fouet de Diana - artefact qui oblige son captif à dire la vérité. Ici, un peu de dérision, sans toutefois de second degré. Voilà qui est rare chez M. Snyder…

Reste la musique d’Elfman qui fait signe vers son thème du Batman de Burton et vers celui de Williams - le seul vrai thème de Superman ! Allez, retournons en 1978, et rêvons avec Christopher Reeves, à jamais le héros en collant !, car le cinéma rend immortel. 

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