ça marche comment ?
Il suffit d’arrêter le temps. Et de le remettre en route ensuite. Cela semble être la fonction de la clef que Kronen insère dans sa poitrine, pour se remonter lui-même tel un jouet mécanique. Une créature typique du bestiaire de Guillermo Del Toro, très conscient de ses propres effets signature. Les rouages, les mécanismes, l’horlogerie sont parmi les plus saillants et les plus visuels. La machine scarabée de Cronos, le passe-temps du Capitaine Vidal, horloger amateur, l’infrastructure intérieure des Jager de Pacific Rim, Les rouages animant les légions d’or, et ceux qui composent la grande terrasse de leur mausolée, pour ne citer que ceux là- mais ces motifs apparaissent à un moment ou un autre dans presque tous les films du mexicain. C’est d’autant plus apparent dans Hellboy que le film est adapté d’une bande dessinée, et qui si Kronen y est présent, il n’a pas du tout cette spécificité bien pratique se faire passer pour mort auprès de ses antagonistes.
Il suffit d’arrêter le temps. Et de le remettre en route ensuite. Cela semble être la fonction de la clef que Kronen insère dans sa poitrine, pour se remonter lui-même tel un jouet mécanique. Une créature typique du bestiaire de Guillermo Del Toro, très conscient de ses propres effets signature. Les rouages, les mécanismes, l’horlogerie sont parmi les plus saillants et les plus visuels. La machine scarabée de Cronos, le passe-temps du Capitaine Vidal, horloger amateur, l’infrastructure intérieure des Jager de Pacific Rim, Les rouages animant les légions d’or, et ceux qui composent la grande terrasse de leur mausolée, pour ne citer que ceux là- mais ces motifs apparaissent à un moment ou un autre dans presque tous les films du mexicain. C’est d’autant plus apparent dans Hellboy que le film est adapté d’une bande dessinée, et qui si Kronen y est présent, il n’a pas du tout cette spécificité bien pratique se faire passer pour mort auprès de ses antagonistes.
Le système est d’ailleurs plein de cette poésie visuelle
dont Del Toro parvient à infuser ses films dans les meilleurs moments, elle
confine même ici à un humour « non sensique » dont il est parfois
très proche. Car enfin, comme peut fonctionner ce Kronen ? Est-ce qu’il se remonte comme un ressort et
qu’en attendant de repartir il est comme mort ? S’agit-il d’une invention
absurde comme celles du Baron de Munchausen, qui arrivé au bout de la corde
qu’il grimpe prend l’autre extrémité pour la prolonger ? Kronen, quand il
est mort, se rend-il tout simplement vivant ? Evidemment, aucune
explication ne nous est donnée mais la poésie d’un beau paradoxe entre cette
mécanique en apparence toute rationnelle qui compose Kronen, et son
fonctionnement parfaitement illogique.
ça vaut le coup ?
C’est difficile de savoir avec Kronen, puisque l’apparence
du personnage est entièrement conçue pour qu’il soit complètement
inexpressif : son langage corporel est complètement mécanique, et il porte
divers masques… qui dissimulent un visage écorché, dont les moteurs
d’expression sont absents : pas de lèvres, pas de paupières, pas de
sourcils. Machine de mort, Kronen est également un nazi, on peut aussi voir en
lui la personnification de la volonté désincarnée de destruction du régime. Une
puissance de mort sans affect, dont Del Toro souligne la nature éternelle- En
ce sens c’est un réalisateur de films fantastiques classique : comme
Fischer ou Carpenter, il croit en l’existence d’un Mal absolu. Dont Kronen est
ici une image. D’ailleurs, on peut souligner qu’il est au service des autres
personnages. Kronen, qui n’a pas de « vie » propre, n’a pas non plus
de volonté. Cela aussi donne du relief au personnage : absolument
redoutable et fatal, il se laisse commander comme un toutou par Elsa. Il est ce
mal absolu, qui tue tout ce qu’il touche, mais n’a ni conscience ni direction,
qui est informe d’une certaine manière- d’ailleurs on le voit dans un autre scène, Kronen se vide non pas
de son sang mais d’une sorte de sable, encore une idée poétique, il est
littéralement un sablier- Kronen est le sac dans lequel la mort est enfermée.
Et c’est la volonté des autres personnages, leur désir de pouvoir et de
destruction qui font agir Kronen. Ça c’est aussi un motif de Del Toro : la
mort et la destruction sont les instruments de ceux qui veulent asservir les
autres. Les « héros » chez Del Toro, s’il y en a, le sont en général
malgré eux, parce que les circonstances leur font croiser le chemin de ceux qui
sème la mort. Le héros professionnel, celui qui a la vocation du bien est un
personnage compètement absent de l’univers du cinéaste. On imagine très mal
chez lui un héfos flic, ou un super-héros traditionnel, encore moins un
militaire. Hellboy combat les monstres parce que c’est ce que font ceux qui
l’ont recueilli, les pilotes des Jaeger de Pacific le deviennent parce qu’ils
ont une connexion innée entre eux, les medecins de mimic essayent de réparer ce
qu’il ont provoqué, les enfants de l’échine du diable doivent résister au
carcan que leur imposer leur orphelinat d’abord, puis les plans de Jacinto,
Ofelia doit se soustraire à l’autorité de Vidal.
Et on ne sera pas supris que les héros, chez Del Toro soit
presque toujours des personnages qui doivent libérer un imaginaire, ou se
libérer tout court. Tandis que les
« méchants » ont toujours, eux, pour réaliser leurs projets, à
se soumettre à une autorité supérieure dont ils espèrent obtenir un pouvoir.
c’était mieux avant ?
Vu l’allure de Kronen, cicatrices, scarification et
amputations diverses, on ne doute pas qu’il devait avoir bien meilleure mine
avant. La soumission aux puissances obscures des « méchants » chez Del
Toro est souvent traduite par la nécessité d’une mutilation ou d’un sacrifice.
Dans Hellboy, Raspoutine a donné ses yeux ! Tout cela est très classique
dans les mythologies fantastiques, archétypal même. C’est là la limite et la
beauté du cinéma de Del Toro : il est pleinement inscrit dans une
tradition, dont on sent qu’elle lui convient intimement, et qu’il revisite à sa
manière. Cela dit, il est capable de variations très personnelles et étonnantes
sur ces motifs. Kronen est un bel exemple : il a quelque chose du ninja, de la momie, du
Terminator…Et pourtant c'est vraiment une créature qui n'appartient qu'au cinéaste. D’ailleurs dans l’extrait on voit la portée de l’imagination de Del
Toro. L’aspect de Kronen répond directement à la manière dont il est mis en
scène : je trouve très élégant la façon dont sa renaissance et montrée à
l’écran par le souffle qui soulève la bâche de plastique qui le recouvre- qui
suffit d’ailleurs immédiatement à nous faire comprendre qu’il est considéré comme
mort. Et comme on le sait depuis disons Nosferatu de Murnau: le mal ne peut mourir. Il circule. Plus ou moins
intensément.
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