Comment ça marche ?
« En 1905 le cargo mixte La galante transportait des
tonneaux de glycérine. Au moment du choc contre un iceberg il est probable que
le corps de l’hiberné ait été submergé par ce produit et mis aussitôt en état
de congélation rapide. La glycérine aurait aussitôt protégé les structures
cellulaires en évitant leur éclatement. » Il suffisait donc d’un peu de
(mal)chance. Et tout cela nous est expliqué par un Michael Lonsdale à peine
intégré au récit par l’artifice habituel bien commode de la conférence de
presse, qui permet à la fois d’économiser son imagination, et de s’adresser
directement au spectateur pour lui dire ce qu’on a à lui dire. C’est que de l’imagination,
on en a guère, et des choses à dire, on en a plein. On est en France, dont
Hibernatus est un bon exemple de la veine fantastique populaire, au même titre
que 25 ans plus tard, Les visiteurs de Poiré. Comme dans le film de Poiré, l’argument
fantastique est au service d’un humour basé sur le décalage entre l’époque d’origine
d’un personnage, et celle dans laquelle il se retrouve. Peu importe, après
tout, le moyen. Même si Molinaro s’attarde,assez inutilement, au début du film
sur la découverte du bloc dans lequel est congelé cet « Hibernatus ».
Un réalisateur un peu plus visuel aurait sans doute profité de cette séquence
pour construire quelque chose de plus proprement cinématographique. Quelqu’un
comme Barry Sonnenfeld aurait sans doute fait de jolies choses du scénario de
Molinaro. Dark Shadows, de Tim Burton, est basé sur le même genre de décalage,
et l’ouverture du film est traité avec un grand soin plastique, et sur un ton
tout à fait tragique. Pas de mélange dans Hibernatus, il n’y en a qu’un seul :
le « Louis de Funès movie »- un genre bien français, aux règles quasi
immuables d’un film à l’autre. J’évoque
Dark Shadows parce que Molinaro a réalisé une autre comédie fantastique, après
Hibernatus, Dracula père et fils, assez réussie, qui se paye même Christopher
Lee dans le rôle du Comte. Le film repose sur les mêmes ressorts que celui de
Burton : le vampire se retrouve confronté, via les volontés d’émancipation
de son fils, à une époque dont il ignore tout des mœurs. Ce qui est assez drôle
c’est que c’est le rideau de fer qui fait office de barrière spatio-temporelle :
c’est en passant du monde communiste à la démocratie occidentale que s’opère le
décalage comique. Rien de tout cela dans Hibernatus, tout juste retrouve-t-on
quelques bribes de comédie sociale quand les valeurs et manières de la famille aristo
très bourgeoise de De Funès est très gentiment moquée.
Ça vaut le coup ?
Si on a des insomnies seulement. Hibernatus est intéressant
en tant que symptôme de ce à quoi on aboutit en France en cherchant à faire du
fantastique très grand public. C'est-à-dire à peine du fantastique, puisque le
genre est réduit à donner une explication à la résurrection de l’hiberné- en
fait le grand père de l’épouse de De Funès- et encore, c’est fait de façon très
« rationnalisée », et via le monologue que j’ai cité- Molinaro ne peut pas refuser plus
explicitement l’imagerie du genre. Même sur le registre de la comédie, qui
reste une veine de la cinématographie nationale très forte, il semble
impossible de financer une comédie fantastique techniquement ambitieuse. Je ne
vois pas d’exemple… Pour resituer Hibernatus à son époque, une forme de
fantastique français plus impliqué trouve paradoxalement sa place à la
télévision. La collection « inédits
fantastiques » de l’INA témoigne de cette production, d’une certaine
vitalité, même si les films ou séries
doivent souvent s’appuyer sur des œuvres littéraires de patrimoine pour montrer
patte blanche. Autre trait bien français : la question de la légitimité
culturelle, d’autant plus que les instances de décisions qui libèrent les aides
et financements permettant de faire des films restent organisées suivant des
logiques claniques et de co-optation où l’expression d’un imaginaire à la fois
populaire et relevant du fantastique n’a guère droit de cité. Ça n’a guère
évolué, et le public a évidemment une grande part de responsabilité. L’histoire
se répète d’ailleurs : c’est de nouveau à la télé qu’un espace pour un
fantastique français se réouvre. Mais cette fois, il a fallu que les américains
de Netflix viennent s’installer tranquillement dans un espace laissé vaquant de
manière incompréhensible. Même s’il faut tout de même se souvenir des efforts
sincères de Canal plus pour tenter de pérenniser un modèle de production de « genre »
en France. Mais peu importe d’où vient l’argent : Marianne, ou Vampire,
existent tant mieux pour leurs auteurs. Molinaro, lui, s’inscrit complètement,
à son époque dans ce cinéma qui pour populaire qu’il soit n’en est pas moi
complètement institutionnalisé. Il a tout de même un certain sens du rythme, et
lorsque De Funès commence à hyper ventiler, il y a de bons moment de montage
nerveux.
C’était mieux avant ?
Avant… après… La situation du fantastique national bouge si
lentement qu’on a le sentiment qu’elle est inchangée depuis 50 ans. C’est
vraiment un trait culturel assez malheureux. Alors qu’il y a chez nous un
énorme public pour le fantastique le plus baroque. Qu’on voit le succès du
fantastique japonais en France, que ce soit du côté du manga ou de l’anime. Et
pourtant, il y a un vrai blocage vis-à-vis des productions nationales. A tel
point que les distributeurs donnent des titres anglais à des films français.
Mais au fond, est-ce vraiment problématique ? Ce qu’il l’est peut-être, c’est
la grande uniformisation de l’imaginaire et de la fiction opérée par les Etats-Unis,
qui ont gagné sur tous les fronts : celui du cinéma, et aussi celui de la
série télé, qui est tout aussi déterminante dans le domaine. Encore une fois la
question que cette colonisation des imaginaires pose, il faut se la renvoyer à
soi-même : les spectateurs regardent bien ce qu’ils veulent, et si l’on
garde l’exemple de Netflix, la plate-forme regorge de film à découvrir en
provenance de tous les pays du monde, jusqu’à l’Inde, Isräel, la Thaïlande, la Corée, il suffit d’avoir un
peu de curiosité. Au cinéma c’est un peu pareil : la multiplication des sites
de VOD rend accessible d’une manière inespérée pour l’amateur des productions
qui existent. Si elles ne sont pas aussi exposées que celles en provenance d’Hollywood,
elles sont tout aussi faciles à trouver. Si on revient en France, La dernière
vie de Simon, ou l’Angle mort, sacrifiés au cinéma sont maintenant disponibles
en ligne partout. Tout est à portée de télécommande, quand on sait quoi
chercher.
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