ça marche comment ?
Grâce à ce qui s’est passé dans le film d’avant. Star
Trek : A la recherche de Spock est la suite directe de Star Trek : La
colère de Khan. Préfigurant les narrations feuilletonnantes des blockbusters
fantastiques d’aujourd’hui, les scénaristes ont prévu, en s’orientant avec le
deuxième film la série vers un space opera beaucoup plus « pulp »,
une suite de rebondissements étalés sur deux films. La charnière entre les deux
parties étant la mort de Spock, shocker de
fin de film, et le lancement de la torpille « Genesis » vers une
nébuleuse stérile à la fin de La colère
de Khan. Elle provoque, c’est inattendu, la transformation de la nébuleuse
Mutara en une nouvelle planète. Mais les
nouvelles vont vite, et la planète suscite bien des convoitises…D’autant plus
que le cercueil spatial de Spock a justement été, comme pour des funérailles en
haute-mer, confié aux flots…stellaires, et s’est ’écrasé sur ladite planète.
Bon, le sous-titre du film ne cache pas le mystère, c’est bien la résurrection
de Spock qui va être tout l’enjeu du film. Elle se produit en deux temps,
suivant la bonne vieille séparation du corps et de l’esprit. Pour le corps,
c’est assez simple, pas besoin de sortir du chapeau des explications
tarabiscotées : L’effet revitalisant de la torpille « Genesis »,
qui a fait d’un nuage stérile une planète luxuriante régénère le corps de
Spock… qui réapparaît, mais en repartant
du début : Nous le découvrons enfant, et il va grandir à vitesse
accélérée, car l’effet miracle a son revers : la poussée vitale formidable
qu’il provoque accélère tout autant les processus vitaux. Autrement dit, Spock
vieillit à vitesse grand V, tout comme la planète qui, en fait, se précipite
vers l’auto-destruction. Il faut extirper Spock au plus vite de l’atmosphère de
Genesis, et lui réinjecter son âme. Ça tombe bien, on nous révèle qu’en fait,
dans le film d’avant, il l’avait rangée à notre insu dans ce bon vieux Mc Coy,
dont la carcasse est un peu étroite pour accueillir en plus de la sienne une
autre psyché bien trempée. Et là, on n’a pas encore parlé des Klingons qui vont
se mêler de tout ça…
ça vaut le coup ?
A l’énumération d’une maigre portion des péripéties du
récit, on voit bien que les scénaristes se sont complètement laissés aller à la
fièvre de l’aventure[1], cherchant
l’émerveillement, le « sense of wonder » propre à l’âge d’or de la S.F, comme dans les récits les
plus trépidants de Edmond Hamilton, Jack Williamson ou Poul Anderson. Sans en
atteindre complètement la qualité parfois proprement délirante, le film ne
s’excuse jamais de son appartenance au genre, et de fait, se pose comme une
sorte de produit de niche, justement destiné au public des amateurs, des
« geeks »- le mot n’a pas encore été popularisé. Comme la mise en
image est très pantouflarde, le film dégage une sorte de radicalité
molle : à prendre ou à laisser dans son imaginaire purement
« pulp », mais sans jamais s’imager dans un flamboyant baroque que le
scénario appelait pourtant. Quand on partage cet imaginaire, impossible de
rester complètement insensible au charme de ce film. On peut mesurer d’ailleurs
ce qui sépare A la recherche de Spock des films relancés par J.J Abrams, et qui
croit, l’idiot, que ce qui manquait à Star Trek, c’était une épaisseur
psychologique au personnages, et des conflits intérieurs auxquels le grand
public pourrait s’identifier…
c'était mieux avant ?
Il y a une ressemblance amusante et éclairante entre la fin de A la recherche de Spock et celle d’Avatar. Or James Cameron a été dans son enfance et son adolescence un lecteur avide de S.F, de son propre aveu, c’est celle publiée jusqu’aux années 50 qui a sa préférence. De fait, il s’agit dans le final des deux films de transmettre, lors d’un rituel indigène à l’issue incertaine, l’âme d’un corps étranger dans le corps d’un natif. Mais si le succès de Cameron fut si grand et tellement supérieur à celui de ce Star Trek, c’est qu’il a su rendre, justement, cette science-fiction accessible, et même excitante, pour un public de non-initiés, voir rétif au genre. Il faut tout le génie de Cameron pour réussir ça… mais Avatar appartient malgré tout à la même famille de films que cette Recherche de Spock. Avatar aurait pu s’appeler « A la recherche de soi »- c’est toute la différence. Mais le film de Leonard Nimoy reste un des ces produits adressés à la niche des amateurs précisément à une époque où on découvrait encore qu’il y avait peut être de la place pour une science fiction populaire à gros budget dont les Stars ne seraient pas forcément en Wars.. C’est peut-être ce qui a longtemps caractérisé les films Star Trek, et qui en a assuré la pérennité. Etre d’abord et avant tout, simplement des films de science-fiction[2]. Parfois, c’est dans la modestie des ambitions que se trouve une forme de grandeur…
[1] C’est Harve Bennett, qui
ébauche l’histoire de la colère de Khan, et écrit A la recherche de Spock. Il
est aussi producteur exécutif sur un bon nombre de films Start Trek période
Kirk/SPock.
[2] D’ailleurs, c’est en
déplaçant l’action sur Terre à notre époque, et en transformant le film en
comédiée que Nimoy offrira à la saga son plus grand succès américain, avec Star
Trek 4 : the voyage home.
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