mardi 18 septembre 2012

56- Le jour où la terre s'arrêta (The day the earth stood still)- Robert Wise- 1951- USA.



Combien de soucoupes se sont-elles posées dans les jardins du Capitole ou survolé la capitale nord-américaine ? Celle que Robert Wise envoie vers la terre en 1951 doit-être une des premières. A son bord Klaatu, ambassadeur pas commode d'un sorte d'une société des Nations Unies de l'espace. Très impliqué dans sa mission, il n'en démords pas : il n'avouera les raisons de sa venue sur terre qu'en présence de tous les chefs d'Etat terriens. Et le secrétaire d'état qui l'accueille a beau, patiemment, lui expliquer que ça ne va pas être si simple, rien à faire. D'autant plus stressant pour le fonctionnaire qu'en cas d'échec, c'est la survie de la terre qui est menacée. On finira tout de même par avoir le fin mot de l'histoire : la terre, en venant d'accéder à l'armement nucléaire, et au vu du passif de ses habitants, a été mis sur la liste des « planètes voyous » par la police de l'espace, et telle un Iran galactique, on la prie d'abandonner la recherche d'armement nucléaire, sous peine de désintégration pure et simple. L'ultimatum posé, le film, alors qu'il aurait pu se relancer, se clôt donc par une fin plutôt ouverte, sans que le sort de l'humanité soit tranché.

Le scénario est bien ancré dans son époque : mise en garde contre le péril nucléaire et phobie du communisme. Si le récit semble à priori légèrement subversif pour l'époque, ce sont généralement les militaires qui participent à la solution, ici c'est une gâchette facile de l'armée qui fait déraper la situation, d'autant plus que le film est produit par la Fox, et si le personnage est littéralement présenté comme une figure messianique (il se choisit comme nom humain Carpenter !) les apparences sont trompeuses. Déjà, parce que comme le dit Wise, Zanuck (le patron de la Fox à l'époque) se contrefiche du message du film (après tout, c'est juste de la SF!), surtout parce que Klaatu, au bout du compte, finit par incarner une certain idée de la diplomatie toute américaine (la stratégie de la carotte et du bâton chère à Kissinger), qui consiste ici à demander à quelqu'un de faire volontairement ce qu'on est bien décidé à lui faire faire de force. Reste un message authentiquement pacifiste- et gentiment naïf- sur les dangers de la course à l'armement.

L'acteur qui prête ses traits à Klaatu (Michael Rennie) imprime la pellicule sans effort : très grand, il impose une présence saisissante, distillant constamment un léger malaise. Par ses sourires posés un rien à contretemps, ses changements d'expression presque mécaniques, l'acteur est remarquable de subtilité.

Et Robert Wise, de son côté, un peu plus compétent formellement qu'un Bert I. Gordon, et à peu près autant qu'un Jack Arnold, évite le recours à des maquillages ou costumes approximatifs, et limite l'appartition du décorum SF à la soucoupe volante de Klaatu et à son robot destructeur Gort. La direction artistique se met à l'unisson d'un noir et blanc élégant et suggère un univers extra-terrestre tout en courbes gracieuses et lumignons clignotants.

On n'oubliera évidemment pas la bande-originale de Bernard Herrmann, qui invente quasiment, pour l'occasion le son du « péril martien » qui servira à d'innombrables reprises, jusqu'au Mars Attacks de Danny Elfman, en passant par le fameux Star Trek The Motion Picture, de Goldmsith, réalisé par le même Wise. La boucle est bouclée. Comme souvent avec le compositeur, chaque apparition de la musique de Herrmann transmets une émotion absente des images.

Le jour ou la terre s'arrêta n'usurpe pas son statut de petit classique. C'est une préfiguration intelligente, un peu démodée mais élégante, d'une idée de la SF comme fable morale, genre qui atteindra son apogée 8 ans plus tard avec la diffusion de la première saison de l'indépassable Quatrième Dimension de Rod Serling.

P.S : Le jour où la terre s'arrêta est l'objet d'une blague potache dans Evil Dead III : Army of Darkness, de Sam Raimi. La phrase qu'Ash ne parvient pas à retenir, et qui le condamne à rester au moyen-âge est celle que l'héroïne du film de Wise doit mémoriser pour annuler le programme de destruction de la terre de Gort, le robot de Klaatu. Plus douée que le héros de Raimi, elle y arrivera, rassurez-vous.

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