vendredi 14 septembre 2012

55- Silent Running, Douglas Trumbull, 1972, USA.



Film pour lequel, une fois n'est pas coutume, le qualificatif de culte n'est pas galvaudé. Douglas Trumbull, déjà reconnu comme un maître des effets optiques est avide de nouvelles expériences et souhaite passer à la réalisation. C'est l'époque mythique à laquelle la Universal, incapable de reproduire industriellement le miracle économique de Easy Rider décide de systématiser le tir à l'aveuglette : à condition de maintenir le budget sous le million de dollar, n'importe qui peut tenter à peu près n'importe quoi.
Et c'est sans doute comme ça que les exécutives de la compagnie voient le projet, même si son orientation science-fictive, sous la houlette de Trumbull, responsable des effets visuels de 2001 Odyssée de l'espace, est potentiellement juteuse, vu la réputation du film de Kubrick.
L'époque est propice à une anticipation inquiète et aux antipodes des divertissants Space-operas des sérials ou des métaphores naïves associées aux invasions extra-terrestres diverses du cinéma des années 50. Et Trumbull tape dans le mille.
Aidé d'un Michael Cimino encore vert, il imagine un point de départ accrocheur et simple : dans l'espace, un équipage de routiers tournent en rond aux commandes d'un immense vaisseau dont les serres abritent les derniers specimens de flore terrestre. Loin de chérir cette futuriste Arche de Noé, les terriens ne savent pas très bien quoi en faire... Et finissent par demander aux truckers du futur de tout faire sauter !

Ce scénario c'est la grande force du film. L'un des membres de l'équipage, Freeman (oui, c'est limpide...) Lowell assassine les deux autres, ne supportant pas l'idée de voir disparaître à jamais l'environnement originel des humains, privant les générations futures d'un contact possible avec leur berceau. C'est Bruce Dern qui interprète l'éco-terroriste, avec tout le cabotinage auquel peut-être réduit un acteur seul en scène pendant près d'une heure. Car après la mort des deux compagnons, la surprise, c'est qu'il n'y a plus de surprise : il ne se passe plus grand chose à bord de l'arche spatiale. Lowell prend soin du mieux qu'il peut de ses jardinières, trompe l'ennuie en faisant le kéké dans d'amusants petits karts utiles pour se déplacer dans le vaisseau, et surtout, va reprogrammer ses deux robots pour qu'ils soient capables d'apprendre à assurer seul la survie des serres.

A la fin du récit, Freeman se donne la mort pour faire croire à ses supérieurs que la mission a été accomplie, et c'est désormais aux robots de dériver dans le vide stellaire, seuls gardiens de tout ce qu'il reste de la flore terrestre. Le film se conclut sur la poétique image d'un petit robot hydratant avec un arrosoir d'enfant une petite pousse, sur fond de ciel étoilé. Impossible de ne pas penser, en voyant cette image, au Wall-E des studios Pixar. Le long métrage d'Andrew Stanton développe d'ailleurs les zones d'ombres du film de Trumbull, en explorant la conscience des robots jardiniers concluant le film de 1972.

Proposant des effets visuels extraordinaires étant donné la modestie de son budget, poncutés d'images marquantes, si Silent Running souffre d'un dramaturgie alanguie, et d'une certaine lourdeur allégorique, il touche à l'essentiel de la science-fiction d'anticipation : proposer en interrogeant le présent avec une prescience saisissante une vision d'un futur possible. Et celui-là est en partie advenu après les 40 ans nous séparant de la confection du film.

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